James Brown, son plus grand album live de tous les temps au sommet de l’Apollo à Harlem
A l’occasion du 90ème anniversaire du Godfather of Soul, Musicolor votre web radio 100% groove, vous raconte l’histoire de cet enregistrement live mythique.
Lorsque l’idée germe dans la tête de James Brown d’enregistrer sa performance dans l’enceinte de l’Apollo Theater situé dans la 125ème rue à Harlem, le Soul Brother N°1 est depuis quelque temps la plus grande attraction scénique du circuit Rythm’N’Blues. Sa côte de popularité auprès du public noir est à son top ! Ils surpassent ses trois rivaux directs du moment, Jackie Wilson, Ray Charles ou encore Bobby ‘Blue’ Band. Il est en pleine bourre et pourtant Syd Nathan, fondateur de King Records, ne croit pas une minute à l’éventuel succès d’un disque live.
L’arrivée de James Brown chez King Records à Cincinnati
Ralph Bass a été responsable de A&R pour King Records pendant de nombreuses années. Au début de l’année 1956, il reçoit une démo d’un jeune chanteur de Géorgie nommé James Brown. La démo avait été envoyée à la fois à King Records et à Chess Records de Chicago, et Bass était dans la course avec Leonard Chess pour le signer. Ce jour-là, King Records peut remercier la météo, une tempête de neige a empêché Leonard Chess de s’envoler pour la Géorgie et Ralph Bass a pu signer le contrat avec James Brown.
1956, premier enregistrement de James Brown and The Famous Flames
Le 4 février 1956, c’est le grand jour, Ralph Bass convoque Mr Dynamite et ses Flames à Cincinnati pour enregistrer la chanson de leur démo ‘Please, Please, Please’. Tout ce petit monde se chauffe la voix et commence l’interprétation. Syd Nathan, le boss de King Records, Gene Redd le directeur musical et Ralph Bass sont présents pour superviser les opérations. Au milieu de la chanson, Syd Nathan bondit et s’exclame : « Qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce qu’ils foutent ? Arrêtez la bande ! » Mais Ralph Bass, qui sent tout le potentiel de ‘Please Please Please’ insiste et dit à Syd que c’est une bonne chanson et de les laisser finir. Syd ne décolère pas : « C’est une chanson stupide. Elle ne contient qu’un seul mot, please.’’ Il leur permet tout de même de terminer l’enregistrement, mais renvoie sur le champ Ralph Bass et refuse dans un premier temps de sortir le disque. Finalement, Syd cède après plusieurs appels de Brown et de son manager. ‘Please, Please, Please’ sort le 3 mars 1956, mais Syd Nathan, n’est toujours pas convaincu, et le sort sur Federal Records, une filiale de King Records. Le succès est immédiat ! La chanson fait son apparition dans les charts R&B début avril, et se hisse à la 5e place. Il se vendra à plus d’un million d’exemplaires. Pour la petite histoire, Syd Nathan s’excusera auprès de Ralph Bass et le réembauchera, tout est bien qui finit bien.
Mai 1962, James a l’idée d’enregistrer un de ses concerts à l’Apollo
C’est au mois de Mai 1962, alors qu’il est la tête d’affiche de l’Apollo pendant une semaine, que James Brown à une idée lumineuse ! Il ressent l’envie d’enregistrer un de ses concerts, afin que le plus grand nombre puisse avoir une idée de l’intensité redoutable de ses shows !
»Même avec les 2 ou 3 concerts que nous donnions quotidiennement à l’Apollo, il était difficile pour notre public de nous voir. Les gens qui ne pouvaient pas venir rataient ce que nous avions de spécial sur scène. Et les gens qui nous voyaient en concert perdaient également cette dimension live sur nos disques. Je savais que l’on pouvait enregistrer beaucoup plus que ce que je donnais en studio. J’ai commencé à parler d’un album live dans mon entourage, afin de le préparer. Ils m’ont tous pris pour un fou, sauf Bobby Byrd. C’est là que j’ai compris qu’il fallait vraiment que je le fasse… »
Un pari fou
Durant l’été 62, il part en tournée avec les artistes de Motown. C’est un évènement car ce sera la seule fois que la Motortown Revue aura pour tête d’affiche un artiste qui ne soit pas signé sur le label de Berry Gordy. Grace à ce document d’archives, replongeons nous quelques instants dans l’ambiance si particulière de cette Revue unique en son genre, nous sommes à l’Apollo en 1963 :
James Brown dira du son Motown, qu’il est le caviar de la musique noire, sophistiqué et lisse.
C’est à l’issue de ces 40 dates, effectuées avec les stars de Détroit, qu’il demande à Ben Bart, qui était en charge de ses tournées, de devenir son manager et plus important encore son partenaire financier.
Puisque Syd Nathan refuse complètement l’idée de cet enregistrement live, c’est vers Ben Hart que James Brown va se tourner pour un petit coup de pouce financier. Aidé par celui-ci, il paie de sa poche 5700 $, afin de couvrir les frais d’enregistrement et la location de l’Apollo, une première dans l’histoire de la 125ème rue d’Harlem !
Dès le 19 octobre 1962, la James Brown Revue donne 2 concerts par jour à l’Apollo. Le King of Soul accorde la plus grande importance a ses performances bien sûr, mais aussi et surtout, à la position des micros, aux costumes de la troupe. Tous les employés de l’Apollo doivent avoir une tenue impeccable ! En une semaine, vingt concerts sont donnés. Le 24 octobre, le record est battu, 4 représentations dans la même journée !
Tout est enregistré, pour avoir un maximum de matières. Le matériel d’enregistrement n’étant pas toujours fiable, James Brown veut mettre toutes les chances de son côté.
Le public est surexcité, les disc-jockeys locaux ont annoncé sur les ondes radiophoniques qu’il y aurait des enregistrements live durant les concerts. C’est Freddy King, Solomon Burke, l’humoriste Pigmeat Markham et TheValentinos qui assurent la première partie. Sam Cooke en personne vient écouter ses petits protégés.
Fats Gonder, le maître de cérémonie, chauffe la salle ! Il énumère de façon survoltée les surnoms et autres faits de gloire du Hardest working man in show-business ! L’ambiance est torride dans la salle, comme le soir de grand combat de boxe…
Comme une tornade, il arrive enfin…il est là en chair et en os, Mr Butane, enivré par sa propre énergie. Il danse comme un dieu, rapide comme une flèche et souple comme un bambou. Il attrape le micro et entame ‘I’ll Go Crazy’. Le public devient fou, lui aussi ! En confiance totale, maîtrisant parfaitement son art, il chante, danse, hurle, implore, se met à genoux et transpire comme jamais. Les morceaux s’enchaînent à une vitesse folle, James Brown prends à peine le temps de respirer entre chaque chanson. Ce travail impeccable est très bien retranscrit sur le disque. C’est Hal Neely, l’ingénieur du son de King records qui se colle au mixage final. C’est lui qui fini par convaincre Syd Nathan de publier l’album. Il sent qu’il a une bombe a retardement dans les mains !
Janvier 1963, sortie officielle du disque ‘Live at The Apollo’
C’est en janvier 1963 que la bombe explose ! C’est la sortie officielle de cette pépite qui excite tout le monde. Même Syd Nathan, qui commence à comprendre et attend fébrilement la réaction des disc-jockeys. Une question se pose, quel premier single extraire de l’album ? Il décide de sortir ‘Prisoner of Love’. Contre toute attente, il se rend compte que les radios diffusent ‘Live At The Apollo’ en intégralité. Elles profitent du changement de face, qui scinde le titre ‘Lost Someone’ en 2 parties, pour diffuser des publicités. A partir de ce jour, Syd Nathan fera une confiance aveugle à James Brown, excepté l’épisode Smash qui aura lieu quelques temps plus tard, mais ça c’est une autre histoire…
‘Live At The Apollo’ est au sommet des ventes, il transcende les barrières raciales, fait l’unanimité. C’est totalement inédit pour une musique Soul brute et sans concessions. En Mai 1963, les blancs se mélangent aux noirs, et se pressent à L’Apollo pour entendre et voir en direct ce qu’ils viennent d’écouter sur le disque. Le King of Soul a finalement réussi son pari et a enregistré le plus grand album live de l’histoire de la musique populaire. L’histoire du Roi de la Soul est en marche, chanson après chanson, il se détachera progressivement de ses contemporains à la recherche du groove suprême.
L’album sera classé soixante-six semaines d’affilée, il grimpera à la deuxième place des ventes d’albums, juste derrière les Beach Boys !
En 2004, la Bibliothèque du Congrès l’a ajouté au registre national des enregistrements.
Le magazine Rolling Stone le classe à la 24e place des 500 plus grands albums de tous les temps en 2003 et en 25e place en 2012.
La renommée de l’Apollo Theater devient alors internationale ! 30 ans plus tard, à la veille d’un énième concert dans l’antre de la 125ème rue, James Brown dira :
»L’ Apollo c’est comme le sang dans les veines. L’humanité devrait en être dépositaire. Dieu devrait en être propriétaire »
Casting de l’album James Brown Live At The Apollo, 1962 :
James Brown : chant Bobby Byrd : voix baryton et basse, claviers sur Lost Someone, orgue Bobby Bennett : première voix ténor Lloyd Stallworth : seconde voix ténor Les Buie : guitare William Burgess : saxophone alto Al Clark : saxophone baryton et ténor St. Clair Pinckney : saxophone ténor Clayton Fillyau, George Sims : batterie Lucas Fats Gonder : orgue Roscoe Patrick, Teddy Washington : trompette Hubert Perry : basse Dicky Wells : trombone
Titres de l’album James Brown Live At The Apollo, 1962 :
01 Introduction to James Brown and The Famous Flames (par Fats Gonder) (1:49)
02 I’ll Go Crazy (2:05)
03 Try Me (2:27)
04 Think (Lowman Pauling) (1:58)
05 I Don’t Mind (2:28)
06 Lost Someone (James Brown, Bobby Byrd, Lloyd Stallworth) (10:43)
07 Medley: Please, Please, Please/You’ve Got the Power/I Found Someone/Why Do You Do Me/I Want You So Bad/I Love You, Yes I Do/Strange Things Happen/Bewildered/Please, Please, Please (James Brown, Bobby Byrd, Sylvester Keels, Sol Marcus, Lloyd Stallworth, Johnny Terry, Guy Wood) (6:27)
08 Night Train (Jimmy Forrest, Lewis Simpkins, Oscar Washington) (3:26)
Hommage à cette grande artiste (Linda Cooke Womack) qui porte maintenant le nom de Zeriiya Zekkariyas C’est Barbara Campbell qui donne le jour à la petite Linda le 25 avril 1953 à Chicago dans l’Illinois. Elle devient l’ainée de la famille. L’heureux papa de ce petit bébé, n’est autre que Samuel Cooke, plus connu sous le nom de Sam Cooke. Écoutons pendant quelques instants sa voix magique avant de continuer […]