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La Blaxploitation

today5 février 2022 223 1

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Entrons dans l’histoire d’un phénomène surnommé : La Blaxploitation !

Nous sommes en 1965, la ville de Watts, située dans le South Los Angeles, est en feu, les émeutes raciales secouent les Etats-Unis. Les Black Panthers en profite pour attirer dans leurs rangs de nouveaux partisans, issus pour la plupart des quartiers pauvres. Ils les incitent à passer à l’action militante !

Les films que l’on peut voir à cette époque sur les écrans américains, mettant en scène des acteurs comme le regretté Sidney Poitier, ne reflète pas vraiment la vraie vie d’une grande partie des Afro-américains. Ces derniers deviennent demandeurs de films plus proches de leurs réalités, un cinéma qui leur ressemble, fait par eux et pour eux : la Blaxploitation.

Les messages délivrés dans la musique par des artistes tels que James Brown, The Impressions ou encore les Funkadelic, sont très forts mais ne sont plus suffisants, il est l’heure de porter tout çà sur grand écran.

Le film qui a mis le feu au poudre est ‘Sweet Sweetback’s Baadasssss Song‘ réalisé par Melvin Van Peebles en 1971. Très marginal, ce long métrage remet en question l’exclusion des noirs dans le cinéma populaire aux Etats-Unis. Autrement dit la Black Exploitation, qui va devenir la Blaxploitation.

Le film est un gros succès, cela interpelle Hollywood qui s’intéresse de très près à ce nouveau phénomène. D’autant plus que les couts de fabrications de ce genre de films sont faibles. L’idée est de courtiser un public Afro-américain pour relancer la fréquentation des salles obscures, qui subissent de plein fouet le pouvoir grandissant de la télévision.

En 1972, Gordon Parks nous transporte dans ‘Les nuits rouges de Harlem‘, nous faisons connaissance avec le détective privé John Shaft, magnifiquement interprété par le beau Richard Roundtree. Trois-quarts cuir, flingue chargé et surtout cette fameuse ‘fucking attitude’…

Ce film est considéré comme le plus emblématique du genre. Pour faire des économies, la Metro-Goldwyn-Mayer envisage que le tournage se fasse à Los Angeles plutôt qu’à Harlem. Gordon Parks est furieux et menace de démissionner. Finalement, tout rentre dans l’ordre, le tournage débute à New York au début de l’année 71. Des scènes seront tournées dans Greenwich Village, notamment au Cafe Reggio situé au 119 Macdougal Street, ou Shaft a un rendez-vous d’affaire. Pour la petite anecdote, j’ai eu la chance de pouvoir y déjeuner en 2012, rien à changer à l’intérieur, quel souvenir ! Toute l’équipe se dirigera ensuite en plein cœur de Harlem, à Roosevelt Island, sur Hudson Street ou encore sur Times Square, pour la suite du tournage.

Dès sa sortie Shaft fait un carton ! Le déclencheur de ce succès ?

Le thème principal, bien sûr ! Composé par Isaac Hayes, çà vous le savez, mais saviez-vous qu’il avait auditionné pour jouer le rôle principal ? Bon finalement il est choisi pour composer la bande originale du film. Bonne pioche ! Il dira :  »Shaft m’a fait connaitre à travers le monde, quand je suis entré en studio j’étais nerveux, c’était la première fois que j’écrivais une musique de film et je ne savais pas si j’allais en être capable ».

Je pense que tout le monde connait la réponse !  La matrice de la Blaxploitation est en place, toujours la même recette infaillible, beaucoup d’action, un héros entouré de jolies filles, et qui gagne toujours à la fin, le tout au cœur du ghetto. Sans oublier une bande son à la hauteur, of course !

L’impact de la musique de Shaft a été si fort que tous les producteurs sont attirés par ce nouveau courant, et font appel à toutes les pointures de l’époque en matière de Funk, Soul, RNB ou Jazz. Ils sont aidés par des labels comme Motown ou Stax Records, qui ne demandent que çà. Une véritable aubaine pour placer leurs artistes !

En 1972, Shaft devient une série. La même année sort ‘Trouble Man‘ avec une musique signée Marvin Gaye. Si les scénarios ne sont pas toujours à la hauteur, les bandes originales sont exceptionnelles, comme celle de Curtis Mayfield dans le film ‘Superfly‘. Les chansons ‘Freddie’s Dead‘ ou encore ‘Pusherman‘ sont classées parmi les meilleures qu’il ait jamais écrites.

Réalisé par Larry Cohen, ‘Black Ceasar‘, le parrain de Harlem, joué par Fred Williamson, sort sur les écrans en 1973. C’est le ‘Godfather of Soul‘, James Brown, qui compose la musique du film. Mention spéciale pour l ’excellent ‘Down Ant Out In New York City‘.

La même année, la panthère noire Pam Grier fait son apparition dans ‘Coffy‘, belle est dangereuse à la fois, puisqu’elle cache dans sa coiffure afro des lames de rasoir. On fait appel au grand Roy Ayers pour la bande son, il ne se fait pas prier.

En 1974, Pam Grier est de retour dans ‘Foxy Brown‘. Cette fois-ci, c’est Willie Hutch, celui qui a écrit ‘I’ll Be There‘ pour les Jackson 5, qui écrit les thèmes du film. Il composera également la musique du film ‘The Mack‘.

Beaucoup diront que la plupart des films de la Blaxploitation sont de ‘sympathiques nanars’, mais le genre a tout de même donné naissance a de bons long métrages. Je pense notamment à ‘Across 110th Street‘ (‘Meurtres dans 110ème rue‘). Anthony Quinn, Anthony Franciosa, Yaphet Kotto et notre ‘Huggy les bons tuyaux’, Antonio Fargas, font partis des rôles principaux dans cette histoire de petits malfrats réalisé par Barry Shear en 1976. Le thème principal du film ‘Across 110th Street‘ est devenu un grand classique, il est interprété par un Bobby Womack au sommet de son art. Ce score est signé par J.J. Johnson.

Le succès de la Blaxploitation durera un peu plus de 4 ans. Le genre finit par s’essouffler et n’attire plus le public en salle. Les réalisateurs manquent d’imagination pour renouveler le genre et tue la poule aux œufs d’or. L’autre raison majeure, c’est que les acteurs noirs commencent à être sollicités pour des films traditionnels.

Pour conclure, je dirais que même si la plupart des films de la Blaxploitation étaient de qualité moyenne, violents, souvent remplis de clichés et de préjugés, mais à chaque fois, ce fut l’occasion de nous offrir une bande originale de grande qualité.

La Blaxploitation, source d’inspiration de Musicolor

 

 

 

Écrit par: Eric

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